depuis la plage
que le retour
serait impossible
on avait bien dit
constat de vos troubles crises
agents de la représentation
qu’on ne distinguait plus bien
l’uniforme du civil
que le civil lui-même
c’était confondu
de la tête au cul
dans le décors qui l’habillait
ce qui devait arriver arrive
nos jolis petits poèmes
de prospectives abrasives
ont été concurrencés par le réel
c’est ce qui est dit
et encore
le réel comme on le nomme
aurait pris un peu d’avance
sur le retard de votre poussive réalité
sachez
pour commencer
qu’on ne discute pas avec les traîtres
voici l’une des marques de notre primitive éthique
nous parodions vos prétextes fabulistes-démocratiques
c’est peut être aussi et selon vous
le signe de notre manque d’ouverture
condensé de sommes de mauvaises volontés
notre part
cet éternel manque de civisme
dites vous
étrange chose que l’injustice
se plaigne de l’incivilité
il nous faut vous faire remarquer
qu’à ce jour
la violence présumée
s’est contentée de pousser les portes
de vos taudis de parts de sièges
nous ne sommes pas entrés
nous autres un peu sauvages
mais foule est faite de sages
nous renifler d’abords
nous sentir
nous mordre ensuite
tous les corps de métier sont à la rue
boxeur dernier en date
à quand les artificiers
désormais
c’est le 1er mai toute l’année
notre propre est de ne rien pouvoir prévoir
d’y voir suffisamment clair pour faire sans prédire
est là votre gène
ce qu’il manque à la gouvernance
c’est la vue et l’ouïe
ils cherchent déjà et toujours
en temps de chute
les oreilles et les bouches corrompues
quelques yeux en manque d’attention
je t’écris depuis ce lieu quelconque
que tu sauras sans doute retrouver
appuyé de quelques de tes agents appareillés
ce lieu vague et mouvant
des lieux que je suis en lieux que je foule
depuis la plage que j’ai quitté
au dehors du désert
de communes petites entreprises en crise
depuis ce lieu quelconque qui pourtant t’échappe
des menaces que nous sommes
champs, rues, aéroports, gares
depuis l’attente et depuis trop tard
pour conjurer le vide qui te constitue
tu te nourris de nos expressions
de ce que tu en tires de conclusions
tu te nourris et nourris ainsi
les récits que tu montes et qui justifieront
les moyens de ta piétinante progression
tu te renseignes
l’air de rien
tes supérieurs fabriquent
les croisements qui te serviront à relier
le balbutiement de tes organes vérolés
l’air de rien
te pensant camouflé de tous
protégé
ce qu’il reste à faire
en ces temps qui mettent
à nu tout le jeu pipé
que tu souhaites voir perdurer
à nu l’incertitude et l’impéritie
qui on fait des tiens les héritiers
d’un bien pourtant commun
à nu
ce qu’il nous reste à faire
c’est te conseiller
te faire part
de nos bons conseils d’ouvriers
dans la seule langue que tu connais
nous allons t’entraîner
produire du collectif
faire de toi un concourant
nous serons créatifs
tu deviendras le devenir
l’acteur de ta propre victoire
tu as le premier rôle
au sein d’une organisation systémique
c’est une séance participative
sur le thème du départ
notre vœux le plus sincère
tu le sais
alors voilà
pars, quitte
ton poste, ta fonction
tes horizons magouillards
les dessous de table que tu sécrètes,
ta somme de sales petits mensonges
ce que tu appelles encore carrière et mérite
fuis, cours, quitte
sache qu’il n’y aura pas de discussion
pas d’ordre possible
pas de retour probable
on sait se pendre à tes mots
nous ne venons de nulle part
sache que si tu insistes
si tu persistes
à venter la fermeté comme seule oraison
c’est la fermeté qui viendra à toi
mais cette dernière sera celle de la fureur
et l’histoire sait où et comment
l’humanité à su se perdre
se confondre en charnier
au fond
tu suis ce chemin là
car c’est cela ton manque
l’air de rien
ce que tu souhaites
des images de suite et de fins
plus rien ne tiens
partout d’imbéciles fascistes
prennent les pouvoirs
de n’avoir qu’en unique projet
l’anéantissement de tout
ce qu’il reste de vie sur cette Terre
tous agissent en colons décérébrés
bafouent les droits premiers
tous incapables de reconnaître
de percevoir
incapables de sentir
de voir
d’embrasser ce qui est là
tous poursuivent de viles manœuvres
aux services de leurs poches et de fait
contribuent à l’enracinement d’une misère
sensible, matérielle, affective
voilà pourquoi et comment
toi aussi
tu es arrivé là
si nous ne faisons pas tomber
les pouvoirs en place
et l’ordre nauséabond
qui règne sur nos vies
cette terre qui nous précède
faite de tous les éléments qui la soude
ne tardera pas à disparaître
je t’écris depuis trop tard
pour t’aiguiller
comme on aiguille à notre façon
les castors contenants que tu achemines
discrètement
agent
dis à tes supérieurs
de mettre la clé sous la porte
nous nous chargerons nous même
de l’état des lieux
dis leurs qu’il n’y a pas de gueux
et qu’internet n’est pas la raison
de la présente colère bourgeonnante
dis leur que nous redistribuerons
les terres et les pierres
dis leurs encore
que ce qu’ils craignaient hier de l’outre-mer
suit sont court incendiaire
ici même
qu’il ne faudra pas plus de trente semaines
pour faire de la France un pays insulaire
nous connaissons les arrières-cours
la gestion des foules
la fragilité des poutres
tous ce qui t’échappes t’effraie
nous sommes de ceux là
aucun de vos vieux jeux
prétextes à urbanisme
ne suffiront à éteindre le feu
sur lequel on souffle
dis leurs et dis toi
que la fête a commencé
qu’apogée et périgée
en cette époque se confondent
dis leur d’ordonner aux troupes
le retour au panier
d’abandonner toute perspective
offensive et défensive
ne sacrifiez pas les vies
de ceux qui osent encore
retenir vos murs
de leur indiscutable
dessein de ruine
la colère débute déjà
à vous être retournée
avec le temps
nous avons appris
à compter nos morts
dis leurs et dis toi
que la fête a commencé
et qu’une fête qui bat le terre-plein
ne se termine pas toujours bien
depuis nulle part
depuis trop tard
janvier 2019
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Texte publié sur le site lundimatin :
https://lundi.am/Poeme-depuis-trop-tard