09/03/2019

poème depuis trop tard






on avait bien prévenu
depuis la plage
que le retour
serait impossible


on avait bien dit
constat de vos troubles crises
agents de la représentation
qu’on ne distinguait plus bien
l’uniforme du civil

que le civil lui-même
c’était confondu
de la tête au cul
dans le décors qui l’habillait

ce qui devait arriver arrive
nos jolis petits poèmes
de prospectives abrasives
ont été concurrencés par le réel

c’est ce qui est dit
et encore

le réel comme on le nomme
aurait pris un peu d’avance
sur le retard de votre poussive réalité

sachez
pour commencer
qu’on ne discute pas avec les traîtres

voici l’une des marques de notre primitive éthique
nous parodions vos prétextes fabulistes-démocratiques

c’est peut être aussi et selon vous
le signe de notre manque d’ouverture
condensé de sommes de mauvaises volontés
notre part
cet éternel manque de civisme
dites vous

étrange chose que l’injustice
se plaigne de l’incivilité


il nous faut vous faire remarquer
qu’à ce jour
la violence présumée
s’est contentée de pousser les portes
de vos taudis de parts de sièges

nous ne sommes pas entrés

nous autres un peu sauvages
mais foule est faite de sages

nous renifler d’abords
nous sentir
nous mordre ensuite

tous les corps de métier sont à la rue
boxeur dernier en date
à quand les artificiers

désormais
c’est le 1er mai toute l’année

notre propre est de ne rien pouvoir prévoir
d’y voir suffisamment clair pour faire sans prédire

est là votre gène

ce qu’il manque à la gouvernance
c’est la vue et l’ouïe
ils cherchent déjà et toujours
en temps de chute
les oreilles et les bouches corrompues
quelques yeux en manque d’attention

je t’écris depuis ce lieu quelconque
que tu sauras sans doute retrouver
appuyé de quelques de tes agents appareillés

ce lieu vague et mouvant
des lieux que je suis en lieux que je foule

depuis la plage que j’ai quitté
au dehors du désert
de communes petites entreprises en crise

depuis ce lieu quelconque qui pourtant t’échappe
des menaces que nous sommes
champs, rues, aéroports, gares
depuis l’attente et depuis trop tard

pour conjurer le vide qui te constitue
tu te nourris de nos expressions
de ce que tu en tires de conclusions
tu te nourris et nourris ainsi
les récits que tu montes et qui justifieront
les moyens de ta piétinante progression

tu te renseignes
l’air de rien
tes supérieurs fabriquent
les croisements qui te serviront à relier
le balbutiement de tes organes vérolés
l’air de rien
te pensant camouflé de tous
protégé

ce qu’il reste à faire
en ces temps qui mettent
à nu tout le jeu pipé
que tu souhaites voir perdurer
à nu l’incertitude et l’impéritie
qui on fait des tiens les héritiers
d’un bien pourtant commun
à nu

ce qu’il nous reste à faire
c’est te conseiller
te faire part
de nos bons conseils d’ouvriers

dans la seule langue que tu connais
nous allons t’entraîner
produire du collectif
faire de toi un concourant
nous serons créatifs
tu deviendras le devenir
l’acteur de ta propre victoire
tu as le premier rôle
au sein d’une organisation systémique
c’est une séance participative
sur le thème du départ

notre vœux le plus sincère
tu le sais
alors voilà
pars, quitte
ton poste, ta fonction
tes horizons magouillards
les dessous de table que tu sécrètes,
ta somme de sales petits mensonges
ce que tu appelles encore carrière et mérite
fuis, cours, quitte

sache qu’il n’y aura pas de discussion
pas d’ordre possible
pas de retour probable
on sait se pendre à tes mots
nous ne venons de nulle part

sache que si tu insistes
si tu persistes
à venter la fermeté comme seule oraison
c’est la fermeté qui viendra à toi
mais cette dernière sera celle de la fureur
et l’histoire sait où et comment
l’humanité à su se perdre
se confondre en charnier

au fond
tu suis ce chemin là
car c’est cela ton manque
l’air de rien
ce que tu souhaites
des images de suite et de fins

plus rien ne tiens
partout d’imbéciles fascistes
prennent les pouvoirs
de n’avoir qu’en unique projet
l’anéantissement de tout
ce qu’il reste de vie sur cette Terre

tous agissent en colons décérébrés
bafouent les droits premiers
tous incapables de reconnaître
de percevoir
incapables de sentir
de voir
d’embrasser ce qui est là

tous poursuivent de viles manœuvres
aux services de leurs poches et de fait
contribuent à l’enracinement d’une misère
sensible, matérielle, affective

voilà pourquoi et comment
toi aussi
tu es arrivé là

si nous ne faisons pas tomber
les pouvoirs en place
et l’ordre nauséabond
qui règne sur nos vies
cette terre qui nous précède
faite de tous les éléments qui la soude
ne tardera pas à disparaître

je t’écris depuis trop tard
pour t’aiguiller
comme on aiguille à notre façon
les castors contenants que tu achemines
discrètement

agent
dis à tes supérieurs
de mettre la clé sous la porte
nous nous chargerons nous même
de l’état des lieux

dis leurs qu’il n’y a pas de gueux
et qu’internet n’est pas la raison
de la présente colère bourgeonnante

dis leur que nous redistribuerons
les terres et les pierres

dis leurs encore
que ce qu’ils craignaient hier de l’outre-mer
suit sont court incendiaire
ici même

qu’il ne faudra pas plus de trente semaines
pour faire de la France un pays insulaire

nous connaissons les arrières-cours
la gestion des foules
la fragilité des poutres

tous ce qui t’échappes t’effraie
nous sommes de ceux là

aucun de vos vieux jeux
prétextes à urbanisme
ne suffiront à éteindre le feu
sur lequel on souffle

dis leurs et dis toi
que la fête a commencé

qu’apogée et périgée
en cette époque se confondent

dis leur d’ordonner aux troupes
le retour au panier
d’abandonner toute perspective
offensive et défensive
ne sacrifiez pas les vies
de ceux qui osent encore
retenir vos murs
de leur indiscutable
dessein de ruine

la colère débute déjà
à vous être retournée

avec le temps
nous avons appris
à compter nos morts

dis leurs et dis toi
que la fête a commencé
et qu’une fête qui bat le terre-plein
ne se termine pas toujours bien

depuis nulle part
depuis trop tard


janvier 2019 

___


Texte publié sur le site lundimatin :
https://lundi.am/Poeme-depuis-trop-tard